Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la modernisation de l'Etat

et

réponse à la motion Pascal Broulis et consorts sur les expériences en nouvelle gestion publique au sein de

l’Etat de Vaud

 

Liens vers quelques points forts de ce rapport:

Politique de la transparence de l'information
Evaluer régulièrement l’exécution et les effets des politiques publiques
Le plan qualité du service public
Le sens profond de la démarche de modernisation
Participation de la population et des collaborateurs de l’Etat


1. Introduction: un projet mobilisateur

   
L'essentiel en bref: après les économies, la modernisation de l'Etat En décembre 1994, le Grand Conseil acceptait que le Conseil d'Etat entreprenne un vaste programme d'économies au sein de l'administration cantonale. Dès le départ, il était prévu que cette démarche déboucherait sur un projet de modernisation de l'Etat. La nécessité de réaliser des économies aura été l’aiguillon stimulant l’administration à adapter ses prestations et son fonctionnement aux nouvelles exigences de la société.

Aujourd’hui déjà, l’administration cherche à évoluer et à s’adapter aux nouvelles conditions socio-économiques. De nombreux services ont entrepris ou désirent entreprendre des actions portant sur la qualité ou une gestion plus autonome (enveloppes budgétaires et contrats de prestations). Le projet de modernisation répond donc à une aspiration de l’administration autant qu'à un souhait des autorités.

La modernisation de l’Etat comprend deux volets. Le premier est composé des grandes politiques publiques dont l’objectif premier ne concerne que marginalement le fonctionnement de l’administration. Il s’agit notamment de l’école vaudoise en mutation, de Police 2000 ou de la régionalisation de l’action sociale. A la différence du premier, le deuxième volet est centré essentiellement sur le fonctionnement interne de l’administration.

  Le but du présent rapport est d’exposer au Grand Conseil le projet de modernisation interne de l'Etat, les priorités définies par le Conseil d'Etat et la direction dans laquelle la gestion des affaires publiques va s'engager ces prochaines années.
La situation particulière du canton de Vaud Pour conduire la réforme, le Conseil d’Etat s’inspirera naturellement des expériences menées dans d’autres administrations publiques, en Suisse et à l’étranger. Il bénéficiera également des expériences déjà accumulées au sein de l’administration vaudoise, notamment aux Hospices cantonaux, qui sont précurseurs dans ce domaine. Il se réfère à la théorie de la nouvelle gestion publique (NGP), mais sans en faire un nouveau dogme. La NGP sera appliquée de manière pragmatique, en fonction de nos besoins propres et de la culture politique vaudoise.

Contrairement à la plupart des expériences menées dans d'autres cantons, la réforme vaudoise visera d'emblée l'ensemble de l'administration. C'est en effet tout l'Etat, et donc toute l'administration, qui doit affronter le scepticisme, voire la méfiance d'une partie de la population. C'est donc à tout l'Etat, et à toute l'administration, qu'il appartient de donner tort aux sceptiques et de regagner la confiance de la population. Le moyen d'y parvenir est une réforme profonde, efficace et visible, propre à rendre aux citoyens le sentiment de la proximité de l'Etat, et aux fonctionnaires la fierté du service public.

Le changement a déjà commencé
[début]
La dynamique du changement est déjà perceptible au sein de l'administration vaudoise, que l’on pense à la réorganisation des départements, à la modernisation de la Chancellerie, à la politique de la transparence de l'information ou aux nouveaux outils de gestion financière.

Il faut maintenant fédérer tous les projets en cours ainsi que ceux qui vont éclore et donner une unité et une dynamique à la modernisation de l'Etat. Cette mission appartient au Conseil d’Etat, qui pour y parvenir, définit des objectifs généraux et propose des structures simples : une commission parlementaire, une délégation du Conseil d'Etat, un comité stratégique et une cellule opérationnelle. La mobilisation du personnel sera en première ligne l’affaire des chefs de service, avec le soutien de nouveaux moyens de communication, notamment un journal interne.

  En adoptant ce rapport, le Grand Conseil donne un signe clair aux collaborateurs de l'Etat et aux citoyens vaudois: l'administration relève les défis de notre temps, se transforme et se met en phase avec la société qui évolue.
   
Motion Broulis et consorts Le 24 juin 1996, M. le député P. Broulis a déposé une motion dont le texte est repris ci-dessous :

"La crise financière que certains pays, dont la Suisse et les cantons sont en train de vivre, la perte de confiance du public envers l’administration et les instances politiques, sont les différents facteurs qui nous obligent impérativement à repenser le rôle que l’Etat doit en priorité jouer.

Repenser le fonctionnement de l’Etat et de son administration ne signifie pas obligatoirement le démantèlement du service public. Bien au contraire, la redéfinition des activités de l’Etat permettra à ce dernier de les adapter au nouvel environnement économique et social qu’il doit et devra affronter ces prochaines années (stagnation des recettes fiscales, concurrence entre Etats, dépenses sociales en hausse, etc.).

En parallèle, le monde politique (exécutif, législatif) a également l’obligation d’évoluer et de se " moderniser " en fonction des nouvelles attentes de la population et des nouvelles tâches de contrôle et de suivi qui vont immanquablement lui être confié.

Un parlementaire de " milice ", doit pouvoir disposer de moyens de contrôle et de gestion appropriés aux tâches que le " citoyen " lui " délègue " afin de rester crédible aux yeux de ce dernier.

  Si le monde politique ne doit pas être à l’affût de toutes les nouvelles méthodes de gestion, il lui faut par contre expressément suivre attentivement les différentes évolutions afin de se former. La formation et les phases successives d’apprentissage aux nouvelles méthodes consistent à découvrir d’autres systèmes de gestion, de parler un langage commun, d’évoluer, de changer et surtout de poser les bases d’un partenariat crédible entre l’administration, le gouvernement et le parlement. C’est par la connaissance que l’on va améliorer la régulation des institutions.

Il n’y a pas de recettes prêtes à l’emploi ni solutions miracles; il ne faut donc pas les chercher. Rien n’est simple, toutes les possibilités doivent êtres envisagées.

C’est, en autre, quand les ressources financières sont limitées qu’il est indispensable que les administrations publiques se dotent de méthodes de travail plus modernes et plus efficaces.

Le New Public Management (NPM)

Il est vrai qu’on parle beaucoup actuellement de nouvelle gestion publique, souvent sans savoir ce que l’on attend par ces termes et les méthodes utilisées.

Les publications foisonnent d’articles sur le New Public Management (NPM), la nouvelle gestion publique (NGP) ou la Gestion publique axée sur l’efficacité (GPE), et il existe bien évidemment une importante littérature dans ce domaine.

Les premiers mouvements basés sur le NPM qui ont conduit à une profonde réforme de la gestion publique sont à constater à l’étranger, et plus particulièrement aux Etats-Unis (reinventing governement), au Pays-Bas avec le modèle de Tilburg, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Ces Etats ont été les premiers à appliquer le NPM.

A ce jour, en Suisse, il n’y a pas d’exemples concrets ayant " aboutis ". Un certain nombre d’expérimentations sont en cours dans les cantons de Berne, Lucerne, Soleure, Zurich, Fribourg, Genève, Valais et dans certaines communes ou grandes agglomérations, dont notamment Baden, Berne, Winterthur et Zurich.

Plus près de chez nous, dans le canton de Vaud, un expérience de nouvelle gestion publique est en cours au sein du Service des hospices cantonaux. Ce service est actuellement la seule entité de l’Etat à être au bénéfice de " l’enveloppe budgétaire " ou " enveloppe globale ". Il va, ces prochains mois, élaborer un " contrat de prestations " qui liera

   
  le service et la Faculté de médecine à l’Etat. Ce projet sera soumis au parlement, en principe lors de la session de septembre.

Il est prématuré de tirer un bilan des expériences en cours en suisse et terre vaudoise.

Il serait donc très intéressant de tenter d’autres expériences au sein de l’administration vaudoise sur l’exemple de ce qui se fait à Soleure.

Le canton de Soleure a prévu des expériences qui touchent le plus grand nombre possible de secteurs. Ces expériences sont prévues dans un premier temps pour une période d’essai de trois ans. Elles concernent par exemples les services ou institutions suivants :

- tous les hôpitaux subventionnés par le Canton de Soleure;

- le contrôle des véhicules à moteur;

- un pénitencier;

- les centres régionaux de placement;

- les ateliers d’occupation;

- l’école ESCEA d’Olten et l’ETS d’Oensingen;

- l’Office de la protection de l’environnement;

- l’Office de l’informatique et de l’organisation.

Ces derniers sont gérés depuis le début de l’années 1996 sur la base de " mandats de prestations " et d’ " enveloppes budgétaires ".

Le Grand Conseil de Soleure, fondé sur un nouvel article " expérimental ", en a fixé les conditions-cadre et le processus tout en édictant des directives à ce sujet et ce pour une période d’essai de trois ans.

Conclusion :

Il est bon de rappeler que le NPM est principalement axé sur le changement. Il abandonne la stagnation pour plus d’efficacité et ne prône pas le " moins d’Etat "

Le NPM oblige immanquablement les administrations à repenser leur fonctionnement. Mais, comme relevé plus haut, peu de réalisations ont montré jusqu'à ce jour les limites et les avantages de cette gestion. Il est clair que le NPM ne s’appliquera pas à tous les services de l’Etat; une coexistence de plusieurs modèles d’organisation est souhaitable et possible.

Les voies du NPM ne sont pas celles de la privatisation ou de la délégation des pouvoirs politiques. Elles favorisent l’analyse des prestations offertes par l’Administration aux citoyens et permettent de redéfinir les priorités.

  Il serait donc intéressant d’examiner l’introduction de telles méthodes à une plus large échelle et de tenter ces expériences pour une période expérimentale à définir et d’éviter, par là même, l’introduction d’ " enveloppes budgétaires " pour certains services de l’Etat avant qu’un " contrat de prestations " n’ait été décidé et négocié entre les différents partenaires.

Ces expériences nous permettraient de mieux comprendre ce qu’est un " contrat de prestations ", l’autonomie qu’il donne et la façon dont le monde politique doit contrôler l’entité au bénéfice d’un "contrat de prestations" et d’une " enveloppe budgétaire ". Le NPM exigera obligatoirement des efforts supplémentaires à tous les niveaux (gouvernement, parlement et administration).

C’est également à ce " prix " que l’on pourra régénérer l’efficacité du service public."

La commission du Grand Conseil chargée de la prise en considération de cette motion s’est réunie le 7 octobre 1996, sous la présidence de M. le député G. Dyens. La commission a estimé que le Grand Conseil devait donner un signe clair au gouvernement pour qu’il poursuive la mise en œuvre des initiatives prises dans le sens de la modernisation de l’Etat. Elle proposait au Grand Conseil de prendre en considération la motion.

Le 12 novembre 1996, le Grand Conseil a accepté les conclusions du rapport de la Commission et renvoyé au Conseil d’Etat cette motion pour étude et rapport.

Le présent rapport constitue la réponse à cette motion.

 

2. Le contexte

Le canton de Vaud dans un monde en plein bouleversement A l’instar des autres cantons, de la Confédération et de tous les pays industrialisés, notre canton vit une succession de bouleversements dont les effets se perçoivent à travers la crise économique et ses corollaires : le chômage, les difficultés financières et l’incertitude face à l’avenir.
  Toutefois, à la différence d’autres crises politico-administratives que le canton de Vaud a déjà surmontées, celle qui nous touche aujourd’hui est globale. Les changements du contexte socio-économique sont à la fois profonds et rapides. La mondialisation de l’économie et des finances a des conséquences directes sur la gestion des affaires publiques ainsi que sur les relations entre les citoyens et l’Etat.
  Les mutations qui touchent notre canton, comme l’ensemble des pays de l’OCDE1 , trouvent leur origine dans quatre facteurs liés entre eux: la mondialisation de l’économie, la crise des finances publiques, les exigences croissantes des contribuables et la crise de confiance des mêmes contribuables à l’égard de l’Etat.
L'économie et les finances passent à l'échelle mondiale La mondialisation a amené des changements profonds dans l’économie ces dernières années. Soutenue par l’évolution des technologies, des communications et des échanges, l’économie est devenue plus dynamique, ouverte et concurrentielle au niveau international. Elle se caractérise notamment par l’accroissement de la mobilité du capital et de la main-d’œuvre (en particulier celle qualifiée).

Cette mondialisation économique et financière a pour première conséquence de déplacer de nombreux pouvoirs de décision de l’Etat national vers des organisations supranationales comme l'Union européenne ou l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC).

Une deuxième conséquence est que les Etats entrent de plus en plus en concurrence les uns avec les autres en tant que sites d’activités économiques, ce qui les oblige à être plus entreprenants pour garder leurs avantages comparatifs. Cette concurrence se manifeste également entre les cantons, qui cherchent à attirer des entreprises étrangères sur leur territoire, avec des moyens tels que promotion économique, avantages fiscaux, mise à disposition de terrains, etc.

Les finances en crise appellent la modernisation de l'Etat La crise des finances publiques, qui se traduit par l’accroissement en spirale de la dette publique, a incontestablement stimulé la volonté de procéder à des changements fondamentaux. En effet, la dette publique constitue un sérieux handicap pour la compétitivité cantonale ou nationale. Plus grave encore, elle réduit la capacité d’action de l’Etat dans tous ses domaines d’intervention traditionnels qui ne relèvent pas de l’économie, comme l’ordre public, la sécurité sociale, la formation, la justice, la santé, etc. Les charges financières découlant de la dette sont autant de moyens dont l’Etat est privé dans l’accomplissement de ses tâches d’intérêt général.

La crise des finances publiques n’est pas nécessairement la conséquence d’une mauvaise gestion. Elle résulte surtout de l’augmentation des charges de l’Etat dans divers domaines où les besoins de la société sont en forte augmentation, comme la formation, la santé, les transports, la protection contre les effets du chômage ou l’assurance vieillesse. C’est ainsi que les dépenses, notamment sociales, augmentent fortement, alors que les recettes fiscales stagnent. Depuis quelques années, la Suisse et tout particulièrement le canton de Vaud subissent de plein fouet cette évolution.

Les citoyens sont toujours plus exigeants Au cours de ces dernières décennies, les Etats ont dû composer avec une montée importante de l’individualisme. En même temps qu’ils jettent un œil plus critique sur le fonctionnement de l’Etat, les citoyens deviennent de plus en plus exigeants. Ils tendent à se comporter vis-à-vis de l’Etat comme des consommateurs, demandant des prestations de qualité, individualisées et rapides, au meilleur prix. Les groupes de pression défendant le plus souvent des intérêts particuliers se sont multipliés et leurs listes de revendications n'ont cessé de s’allonger.
Les citoyens n'ont plus confiance en l'Etat; ils veulent des changements La crise de confiance à l’égard de l’Etat s’observe depuis les années 80 dans les pays industrialisés avancés. On se pose des questions fondamentales sur les fonctions de l’Etat. On lui reproche de coûter trop cher tout en maîtrisant mal les nouveaux problèmes de société que sont la violence, le crime organisé, la toxicomanie, la dégradation de l’environnement, etc. On estime qu’il suscite des besoins et encourage des comportements dépendants et irresponsables. On stigmatise sa lourdeur bureaucratique, sa rigidité et son incapacité à percevoir les besoins nouveaux de la société. Ces critiques sont largement répercutées, voire amplifiées par les médias, dont l’influence croît en raison de leur rapidité, de leur capacité à s’adapter aux goût du public et de la quantité des informations que les nouvelles techniques leur permettent de diffuser.

On peut certes débattre de la pertinence de ces critiques, surtout lorqu’elles sont fondées sur une comparaison superficielle entre les prestations de l’Etat et celles de l’économie privée. Il n’en demeure pas moins que les citoyens les considèrent souvent comme fondées, et qu’ils réclament des transformations radicales, susceptibles de rétablir leur confiance envers l’Etat.

L’Etat peut agir d’abord sur lui-même Ainsi, non seulement l’Etat, mais l’ensemble du système de gestion des affaires publiques est aujourd’hui mis sous pression. L’Etat doit repenser son rôle, s’adapter continuellement à des changements qu'il peut de moins en moins prévoir, et ceci tout en assurant les fonctions permanentes dont nul ne songe à le décharger.

La mondialisation de l’économie ou la montée de l’individualisme dans la sociétés sont des évolutions qu’il s’agit d’accepter. L’Etat doit s’y adapter s’il veut sauvegarder sa capacité d’accomplir ses missions essentielles. Cette adaptation pourra prendre forme dans les domaines où l’Etat peut encore influencer les cours des choses: sa propre organisation, la gestion de son budget, la qualité de ses prestations, la nature des rapports entre l’administration et les administrés, la responsabilisation des fonctionnaires. C’est à cette adaptation que nous pensons lorsque nous parlons de modernisation du secteur public.

Les expériences déjà réalisées Dans la plupart des pays industrialisés avancés, on observe des réformes plus ou moins profondes des gouvernements et de leur administration. Elles prennent des noms différents selon le contexte culturel et politique.

En Suisse, la Confédération et de nombreux cantons ont entrepris des réformes adaptées à leur situation. On trouvera en annexe, à titre d’exemples, la description des réformes en cours dans quatre cantons (GE, LU, SH et VS). Qu’elles aient été initiées par l’administration elle-même (GE), ou exigées par le Grand Conseil (LU), ou encore décidées par le gouvernement sous la pression financière (SH), ces réformes visent toutes à améliorer l’efficacité des services de l’Etat afin de satisfaire les usagers-contribuables. Elles supposent une participation active des fonctionnaires, qui y gagnent à la fois en autonomie et en responsabilités. Elles sont mises en oeuvre progressivement, de manière souple et réversible. Toutes s’inspirent peu ou prou des principes de la nouvelle gestion publique (NGP) mis en oeuvre avec succès dans certains pays anglo-saxons sous le nom de New Public Management.

L’étude des réalisations des autres est naturellement très utile pour la conception de la réforme vaudoise. Elles permet d’éviter la répétition de recherches déjà accomplies ailleurs et, dans certains cas, de sauter l’étape des expériences pilotes. Elle ne nous dispense cependant pas d’élaborer notre propre projet, adapté aux conditions historiques et politiques particulière du canton de Vaud.

  Notre canton a d’ailleurs déjà une expérience propre dans ce domaine. En effet, les Hospices cantonaux ont accompli, sur la base d’un dispositif légal acquis en 1993 et 1996, une profonde réforme qui leur a permis d’anticiper les évolutions de l’environnement économique et sanitaire. Ils disposent désormais d’un contrat de prestations et des outils modernes de la gestion publique. Cette oeuvre de pionnier a ouvert la voie et servira de référence pour l’ensemble des opérations de modernisation de l’Etat.
   
Dans le canton de Vaud, la démarche d'économies doit être complétée par un projet de modernisation qui fédère les réformes déjà en cours Dans notre canton, le Grand Conseil - sur proposition du Conseil d’Etat - a accepté à fin 1994, par le biais du budget, d’entreprendre rapidement un vaste programme de réduction des coûts qui devait être suivi par un projet de modernisation.

La démarche d’économies en cours a des limites, déjà atteintes dans certains domaines, mais elle a contribué à l’instauration d’une dynamique de changement au sein de l’administration, du secteur parapublic et des autorités. Elle a par ailleurs permis de dégager des moyens qui permettent d’assurer le financement - par le biais des réallocations - d’actions innovatrices et motivantes.

  D’autre part, même si les économies annuelles sont réellement mises en œuvre et aboutissent à des résultats mesurables (comme c'est le cas en 1996), elles ne suffisent pas, et de loin, à atteindre l’équilibre du budget de l’Etat. Aucun système ne permet d’envisager à terme une réelle maîtrise des dépenses publiques sans une modification profonde des structures, des usages et des mentalités dans l’administration. Dès lors, il apparaît absolument nécessaire que l’Etat se mobilise autour de la deuxième phase, celle de la modernisation, porteuse d’ambitions nouvelles. Le lancement par le Conseil d’Etat d’un projet clair, positif et concret sur la modernisation de l’Etat apparaît comme prioritaire pour entretenir et développer la dynamique de changement initiée par la démarche d’économies.
  De nombreuses réformes et réorganisations ont été entreprises ces dernières années dans différents secteurs de l’Etat, impliquant parfois la collaboration de plusieurs départements. Toutes ont pour objectif principal d’adapter les activités de l’Etat à une nouvelle situation (socio-économique, financière, etc.), mais elles se développent en ordre dispersé et leurs impacts sur la structure et le fonctionnement de l’Etat sont très variables.
  Ces projets manifestent la vitalité de l’administration, qui cherche spontanément à répondre aux sollicitations et aux besoins d’une société qui change. Mais cette spontanéité ne suffit pas. Elle pourrait même conduire à un désordre néfaste. Il faut donc que les projets de réforme puissent s’ordonner à des objectifs communs et clairement définis. Pour l’instant, il n’existe pas de coordination ni de structure de suivi adaptée. Sans vouloir insérer toutes ces actions dans un cadre rigide, il apparaît aujourd’hui essentiel de fédérer ce qui s’entreprend, afin de donner une unité et une véritable dynamique à la modernisation de l’Etat.

 

3. Les objectifs généraux de la modernisation

  La modernisation de l’Etat a pour objectifs généraux de rendre l’administration plus performante, d’orienter davantage son activité selon les besoins des citoyens, d’améliorer sa capacité d’adaptation à l’évolution de ses tâches et aux limites de son budget. Corollairement, elle vise à consolider la motivation des collaborateurs de l’Etat, auxquels elle apportera davantage d’autonomie et de responsabilités.
Rendre l’administration plus performante. Rendre l’administration plus performante revient à améliorer le rapport entre les moyens utilisés et les prestations fournies. Autrement dit: à accroître l’efficience des services de l’Etat. Cette exigence est primordiale dans un contexte où les moyens mis à disposition de l’Etat sont sévèrement limités. Elle implique la mise en place de nouveaux outils de gestion publique. Elle suppose également une transparence financière telle qu’on puisse connaître le coût réel de chaque prestation de l’Etat et procéder à des comparaisons pertinentes. Ces conditions ne sont pas remplies à l’heure actuelle.
Nécessité de la transparence des coûts La transparence des coûts des prestations favorisera une prise de conscience générale de leur valeur, et permettra de dissiper l’illusion de leur "gratuité". Elle permettra également de déceler les dépenses exagérées ou les travaux superflus, ce qui est très malaisé avec le système comptable actuel.

La transparence permettra également d’établir des comparaisons crédibles entre les performances de diverses administrations. Autrement dit: de pratiquer le " benchmarking ". Elle aidera notamment notre canton à tirer rapidement la leçon des expériences des autres cantons dans les domaines où leurs performances se révèlent supérieures aux nôtres.

Enfin, la transparence apportera les éléments nécessaires à une analyse complète et détaillée des prestations, condition indispensable à toute correction de leur étendue ou de leur mode de production comme à tout appel d’offres mettant en oeuvre une concurrence interne ou externe.

Mieux répondre aux attentes et besoins des citoyens. L’action de l’Etat doit se déployer de manière telle que les citoyens reconnaissent dans les institutions des structures efficaces, ouvertes à leurs besoins et capables de percevoir leurs difficultés. C’est l’une des conditions majeures du rétablissement d’un rapport de confiance entre la population et l’Etat.

A cet égard, la routine administrative constitue un handicap. Elle porte à privilégier les règles bureaucratiques et budgétaires, le respect des formes légales et des procédures. Or ces règles et ces formes sont souvent incompréhensibles pour l’usager. Elles doivent être respectées par l’administration tant qu’elles sont en vigueur et dans la mesure où elles sont nécessaires à la cohérence et à la fiabilité de l’administration. Mais il faut qu’elles soient présentées de manière compréhensible, et appliquées avec bon sens, selon leur intention plutôt qu’à la lettre. Cela suppose que l’administration se montre souple, créative et systématiquement orientée vers la satisfaction des besoins de l’usager.

Evaluer régulièrement l’exécution et les effets des politiques publiques
[début]
Aujourd’hui l’évaluation des politiques publiques, de leur exécution et de leurs effets n’est que trop rarement réalisée. Or le but de l’action publique n’est pas dans l’exécution mécanique des lois, mais dans la concrétisation des objectifs fixés par la population et ses représentants politiques. Dès lors, il ne suffit plus de fournir des prestations et d’offrir des produits; il faut encore s’assurer que ces prestations et ces produits aboutissent aux effets escomptés. Cette évaluation conduira l’autorité, chaque fois que cela se révélera nécessaire, à corriger ses pratiques, ses méthodes, voire le cadre réglementaire ou législatif, afin de pouvoir atteindre de manière satisfaisante les objectifs fixés.
Un processus évolutif, et déjà engagé Une vision globale doit guider les actions entreprises, mais cette vision ne saurait constituer une image détaillée et définitive de la voie à suivre. La modernisation de l’Etat doit au contraire être comprise comme un processus évolutif, qui se corrige et s’enrichit au fur et à mesure des expériences réalisées et des besoins nouveaux qui apparaissent en cours de route. Dans cette perspective, il est indispensable de favoriser la réalisation progressive de projets lorsque leur objectif est clairement déterminé, et sans attendre que tous les détails de leur exécution soient prévus.

C’est dans cet esprit que, depuis plusieurs années, l’administration cantonale vaudoise a entrepris des réformes au sein de ses différents départements et services. En ce sens, comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, l’administration met déjà en pratique, sans leur donner ce nom, certains des principes essentiels de la nouvelle gestion publique.

Les sept projets prioritaires du Conseil d’Etat De nombreux projets de modernisation sont déjà en cours. Le Conseil d’Etat a décidé d’en soutenir sept en priorité. Ces sept projets se distinguent par leurs aspects intersectoriels et transversaux. Il sont cohérents entre eux. Leur réalisation touchera l’ensemble de l’administration, surmontant les cloisonnements excessifs qui font encore obstacle à la collaboration entre les diverses unités administratives. Ils constituent les axes à partir desquels le Conseil d’Etat entend conduire l’ensemble du processus de modernisation.

Les projets prioritaires retenus par le Conseil d’Etat sont les suivants:

1. Modernisation des structures (DUPLO, nouvelle loi sur le Grand Conseil, projets pilotes de modernisation administrative, etc.);

2. Nouvelle politique du personnel (Service du personnel et réallocations: volet social) ;

3. Nouvelle politique d’information et de communication (Chancellerie et Bureau d'information et de communication) ;

4. Modernisation des instruments de gestion financière (Service des finances et CCF) ;

5. Coordination de la gestion informatique (DPSI, CIEV, DEM: transversale informatique) ;

6. Implantation territoriale de l’administration (Orgaterr) ;

7. Répartition des tâches Etat-communes (Service de l'intérieur).

Ces projets sont décrits dans le chapitre suivant.

Les projets sectoriels participent également à la modernisation De nombreux projets novateurs n’ont pas été retenus dans le cadre du présent rapport, du fait qu’ils s’inscrivent dans des politiques publiques plus sectorielles ou que leur objectif premier n’est pas d’améliorer le fonctionnement de l’administration. Mentionnons par exemple le projet de révision totale de la constitution cantonale, Police 2000, l’école vaudoise en mutation, les nouvelles orientations de la politique sanitaire, la réforme de l'ordre judiciaire, la régionalisation de l'action sociale, les hautes écoles spécialisées ou le revenu minimum de réinsertion. Ces projets sont également importants dans le processus général de modernisation de l’Etat. Ils seront soumis aux mêmes exigences et aux mêmes critères d’évaluation que les sept projets prioritaires de la démarche de modernisation au sens strict.

 

4. Les projets de modernisation

  L’ensemble de la démarche de modernisation est placée sous le signe de la transversalité. Chacun des projets prioritaires définis par le Conseil d’Etat a des impacts sur l’ensemble des départements. De plus, ces projets sont liés entre eux et ont des effets les uns sur les autres, d’où la nécessité d’une coordination vigilante.

On trouvera dans ce chapitre une brève description des sept projets prioritaires, puis une mention des principaux outils et services offerts par la DEM à l’ensemble des protagonistes de la démarche de modernisation.

1. La modernisation des infrastructures. La modernisation des infrastructures de l'Etat comprend la réorganisation de l'administration annoncée en mars 1997 sous le nom de DUPLO, et approuvée en juin de la même année par le Grand Conseil. Elle se réalisera également à travers une série d'autres réformes, parmi lesquelles:

le fonctionnement du Parlement et la réorganisation de son secrétariat selon la nouvelle loi sur le Grand Conseil;

les changements étudiés dans l’organisation et le fonctionnement du Conseil d’Etat, sur la base des recommandations d’un groupe de travail mis en oeuvre de 1993 à 1995 (le GT-OFCES), notamment l’examen des délégations du Conseil d’Etat aux départements, la formation continue des conseillers d’Etat, la procédure de co-rapport,etc.;

le développement des fonctions des états-majors des départements;

la poursuite de la modernisation de la Chancellerie;

l’élaboration d’une planification politique et financière de législature.

2. La nouvelle politique du personnel La loi sur le statut des fonctions publiques cantonales, qui date de juin 1947, doit être révisée. En outre, il est temps d'introduire les méthodes de gestion des ressources humaines nécessaires pour anticiper les besoins en personnel, pour gérer l’évolution des tâches de chacun, et pour garantir des conditions d'emploi équitables et compétitives sur le marché du travail.

La nouvelle politique du personnel vise également à créer un climat de travail qui développe la motivation, encourage la délégation de responsabilités et favorise la communication et l'information interne. Développement personnel, plan de carrière, formation permanente et mobilité interne figurent parmi les éléments particulièrement novateurs de ce projet.

  Le projet de nouveau statut des fonctions publiques cantonales sera mis en consultation dans le courant du mois d’octobre 1997. Son passage au Grand Conseil est prévu en juin 1998 et son entrée en vigueur sera effective au 1 janvier 1999.
3. L'information et la communication En juillet 1996, le Conseil d'Etat optait pour une nouvelle politique d'information et de communication fondée sur le principe de la transparence. En même temps, il créait le Bureau d'information et de communication de l'Etat de Vaud (BIC) et mettait en œuvre une série de nouveautés: point de presse hebdomadaire, publication hebdomadaire de "Etat de Vaud Info", revue de presse quotidienne, etc. Un guide pratique pour l’information et la communication ainsi que des directives internes ont été élaborées au cours des premiers mois de 1997. Cette nouvelle politique devra être formalisée à travers une loi sur l'information actuellement en cours de rédaction, et qui sera soumise au Grand Conseil en 1998.

L’information et la communication passent aussi par les contacts directs entre l’administration et les administrés. Dans ce domaine, il est proposé la création d’un guichet d’informations, c’est-à-dire d’un lieu où tout habitant du canton pourrait obtenir les informations dont il a besoin, indépendamment du service dont relève son problème. Ce guichet, relié au BIC, devrait être ouvert en permanence, et desservi par une équipe compétente.

L’équipe chargée de desservir le guichet de l’Etat devrait également être en mesure de répondre aux demandes téléphoniques des citoyens. La création d’une ligne téléphonique ad hoc (numéro " vert ") est prévue à cet effet.

Le " guichet universel " pourrait être la carte de visite de la démarche de modernisation pour le grand public, l’un des premiers signes tangibles du nouvel esprit qui anime l’administration. Il est appelé à jouer un rôle important dans le soutien que le peuple accordera à l’ensemble de la démarche de modernisation.

D'autres projets en voie de réalisation visent à améliorer l’information et la communication à l’intérieur de l’administration, en particulier entre les autorités et les collaborateurs de l’Etat. Ils comprennent notamment la création d’un journal interne produit par le BIC et la mise en place d'un serveur Intranet, en complément du serveur Internet de l'Etat de Vaud.

4. Les instruments de gestion financière Les difficultés financières du canton et les carences constatées ont conduit le Service des finances à lancer dès le début 1996 un programme visant à faciliter la conduite de l'Etat et de ses services, à accroître l'efficacité opérationnelle, à renforcer la sécurité financière et à réaliser la transparence.

Les priorités suivantes ont été définies:

  • améliorer l'organisation comptable et informatique en vue de fournir une information simple, fiable et immédiate;
  • optimaliser et accélérer les procédures d'établissement du budget et accroître sa lisibilité;
  • anticiper les flux financiers de l'Etat à court et moyen terme;
  • permettre l'analyse comparative des investissements et faciliter les choix politiques par une planification à long terme;
  • optimaliser la gestion de la trésorerie et de la dette;
  • systématiser le contrôle budgétaire et créer les conditions favorables à un véritable contrôle de gestion;
  • appuyer les départements en matière de comptabilité et de contrôle interne;
  • favoriser et encadrer les nouvelles formes de gestion (contrat de prestations).
5. La coordination de la gestion informatique Le pilotage du système d'information de l'Etat de Vaud est chargé des missions suivantes:
  • définir les axes stratégiques;
  • proposer les scénarios d’informatisation au Conseil d’Etat et piloter le scénario retenu;
  • définir les référentiels et les normes touchant le système d’information;
  • accompagner les départements dans l'établissement de leur schéma directeur et la définition de leurs projets;
  • valider et contrôler les phases des projets, libérer les ressources nécessaires à leurs réalisations;
  • instituer une culture tournée vers l’utilisateur et promouvoir une approche économique dans toute démarche touchant le système d’information.

La direction du pilotage des systèmes d'information (DPSI) analyse les besoins de coordination et de rationalisation de l’ensemble des systèmes d’information existant dans les différents départements, en tenant compte notamment des impératifs d’économies et de sécurité. Elle se structurera en conséquence. Rattachée au Département des finances, la DPSI est au service du Conseil d’Etat, à qui elle rend compte périodiquement. Elle est un organe transversal chargé de stratégie, de validation, de contrôle et de professionnalisation de la maîtrise d’ouvrage des projets; elle ne joue pas de rôle opérationnel direct. Elle est à la disposition du Grand Conseil et de sa commission spécialisée sur l’informatique pour tout ce qui touche les projets d’EMPD.

   
6. L'implantation territoriale de l'administration (Orgaterr) En revoyant la répartition territoriale des sites décentralisés de l'administration et en mettant sur pied une meilleure gestion des locaux utilisés, l'Etat entend faire des économies d'environ 6 millions par an (personnel, loyers, frais d'infrastructure).

Le Conseil d'Etat a arrêté les principes du schéma directeur de l'implantation territoriale. Seuls sont concernés les offices économiques (commissions d'impôt et recettes de district, registres fonciers, registres du commerce, offices des poursuites et des faillites). Les régions ont été informées des intentions du gouvernement; elles avaient jusqu'à cet été pour faire part de leurs réactions et propositions.

Le schéma directeur et le plan de mise en œuvre seront adoptés par le Conseil d'Etat à la fin 1997. Des mesures complémentaires seront prises, dans l’esprit de la démarche de modernisation, afin de compenser la fermeture de certains bureaux (création de guichets universels, mesures liées au développement économique, aux écoles, aux transports, etc.).

7. La répartition des tâches Etat-communes Etat et communes ont décidé de redéfinir leurs rôles respectifs et de revoir la répartition des tâches et des charges financières. Les réformes qui seront proposées auront, globalement, des répercussions positives pour les communes et pour l'Etat.

Ce projet poursuit les objectifs suivants :

· désenchevêtrer les tâches et mettre en adéquation les compétences, les tâches et le financement

· garantir aux communes la plus grande liberté de décision possible;

· améliorer la qualité des prestation publiques;

· atténuer les inégalités résultant des différences de capacité contributive;

· réduire les coûts financiers globaux.

 

Le Grand Conseil a donné son accord à ce projet en décembre 1996. La 1ère étape, qui s'achèvera à la fin 1997, consiste à dresser un inventaire de toutes les tâches publiques et de leurs coûts. Les flux financiers, le pouvoir décisionnel, les normes légales régissant la répartition et l'attribution des tâches seront notamment définis. Suivront l'étape de la formulation des propositions, puis celle de la mise en œuvre, une fois que le Grand Conseil aura donné son accord.

L’introduction des nouveaux outils de gestion. L’ensemble des projets de modernisation administrative exigera l’utilisation de nouveaux outils de gestion publique. Ces outils seront progressivement mis à la disposition des services, qui seront appelés à les tester, apprendre à s’en servir, voire les développer. Il s’agit plus particulièrement de l’analyse des prestations et des coûts par prestation (comptabilité analytique), des contrats de prestations, de l’analyse des processus, de la gestion de projets.

L’introduction des nouveaux outils sera piloté par la DEM, en collaboration étroite avec les services transversaux (notamment SFI). L’appui de la DEM dans ce domaine pourra être offert à toutes les unités (services, offices, etc.) qui veulent s’engager dans un processus de modernisation sans attendre l’aboutissement des sept projets prioritaires de la démarche de modernisation.

Le but n’est pas uniquement de proposer des services et des outils aux unités qui le désirent, mais aussi de réunir et de capitaliser l’ensemble des expériences de modernisation réalisées dans les différents services.

Le plan qualité du service public
[début]
La DEM est également chargée de piloter le plan qualité du service public, qui a pour but principal de remettre l'usager-citoyen-contribuable au centre des préoccupations de l'administration cantonale vaudoise. Il devrait concourir à la revalorisation de l'image de la fonction publique et atténuer les craintes récurrentes quant à la dégradation des prestations de l'Etat, tant du point de vue de l'usager que du fonctionnaire.

La première phase du plan qualité se réalisera sous forme d’expérimentation dans huit unités pilotes (SCRIS, centre informatique, formation professionnelle, Chancellerie, population et migrations, routes et autoroutes, centre social régional d'Yverdon-les-Bains, centre d'enseignement secondaire supérieur de Beaulieu). Le projet sera présenté au Grand Conseil dans le cadre des réallocations. Après la première phase d’expérimentation qui se déroulera en 1998, il pourra être étendu à tous les services intéressés.

 

5. Structures et répartition des rôles

   
Distinguer entre le politique (niveau stratégique) et l’administratif (niveau opérationnel) En l’état, la démarche de modernisation peut être gérée avec les structures existantes. Il est toutefois nécessaire de préciser les rôles attribuées aux différentes structures, ceci afin d’éviter les chevauchements de missions et d’assurer la cohérence d’ensemble des réformes. Cette clarification s’appuiera sur une distinction claire entre le niveau stratégique, qui relève de l’autorité politique (orientations générales, objectifs stratégiques, choix des priorités) et le niveau opérationnel, qui relève de l’administration (mise en oeuvre, conduite administrative, choix des moyens).
   
  Chaque projet retenu par le Conseil d’Etat dans le cadre de la démarche de modernisation est géré selon les méthodes propres à la gestion de projet. Il dispose ainsi de sa propre organisation (chef de projet, comité de pilotage, etc.) et assure de manière indépendante son suivi.

L’ensemble des projets est suivi par le Comité stratégique (COST), qui veille à ce qu’ils restent dans la ligne fixée par le Conseil d’Etat.

La DEM (Démarche d'économies et de modernisation de l'Etat) assure la coordination opérationnelle des projets.

La liaison entre ces deux organes et le Conseil d’Etat est assurée par la délégation du Conseil d’Etat à la modernisation. Celle-ci devra être alertée, et au besoin convoquée en temps utile, en dehors du calendrier de ses réunions ordinaires, si le COST ou la DEM perçoivent des problèmes de nature à menacer la cohérence de l’ensemble de la démarche ou à perturber son développement.

 
  Le comité stratégique (COST)
Missions du COST Lors de l’initiation de la démarche d’économies, en 1995, il est apparu nécessaire de constituer un comité stratégique à même de se prononcer sur les quatre thèmes suivants: suivi opérationnel des travaux, pilotage contractuel du programme, cadrage des travaux sur le fond et animation du processus de décision.

Dans cette optique, le COST est le garant du respect des objectifs stratégiques fixés par le Conseil d'Etat et le Grand Conseil. Il joue le rôle de charnière entre le niveau stratégique (Conseil d’Etat et Grand Conseil) et le niveau opérationnel (DEM).

Dans la démarche de modernisation, les tâches du COST peuvent se résumer ainsi:

être un organe de réflexion et de proposition sur la modernisation à la disposition du Conseil d’Etat;

assurer une vision globale et interdisciplinaire de la modernisation;

suivre l'avancement des projets de modernisation pour le Conseil d'Etat et lui proposer d’éventuelles mesures de correction.

 

Le COST n'exécute aucun suivi opérationnel; celui-ci est confié en priorité à la DEM.

Structure et composition du COST Le COST réunit à intervalles réguliers des personnes ayant, chacune dans son domaine, d’importantes responsabilités. Sa structure est évolutive.

Dans l’urgence de la démarche d’économies, la présence des conseillers d’Etat au COST paraissait nécessaire. Dans la démarche de modernisation, en revanche, les délais sont moins serrés, si bien que la maîtrise de tout le processus par le Conseil d’Etat peut s’exercer à travers la délégation du Conseil d’Etat à la modernisation, sans contraindre un ou plusieurs conseillers d’Etat à assister à toutes les séances du COST.

Pour conduire les réflexions et les décisions que stimulera la modernisation, et afin d’éviter la pensée unique, le COST doit pouvoir faire appel à toutes les compétences utiles tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’administration, y compris en intégrant dans sa structure des professionnels de la gestion. Tous les responsables de projets de modernisation, les chefs de services et les secrétaires généraux doivent pouvoir être entendus par le COST sur les objets relevant de leurs compétences.

La structure permanente du COST se composera de six membres, soit: le chancelier, les chefs des services des finances et du personnel, le chef du projet " Etat-communes ", ainsi que deux chefs de services dirigés vers les usagers.

Dans cette nouvelle composition, un changement au niveau de la présidence du COST - assurée jusqu’ici par un conseiller d’Etat - s’impose. Celle-ci est d’ores et déjà dévolue au chancelier, qui établit ainsi le lien avec le Collège des secrétaires généraux.

Formellement, la DEM est extérieure au COST, ménageant de ce fait une vision autonome sur les projets soumis à son examen. Elle prépare les dossiers à l’intention du COST et assure leur suivi vers le Conseil d’Etat et vers l’administration. Elle rédige périodiquement un rapport à l’intention du Conseil d’Etat pour l’informer de l’avancement des travaux de modernisation, permettant ainsi de déterminer au plus vite des mesures correctives en cas de dérive de la démarche.

 

  La DEM
Missions de la DEM Dans la démarche de modernisation, la DEM a deux rôles principaux . D’une part, elle est la cellule qui assure la coordination opérationnelle et méthodologique de l’ensemble des projets de modernisation. D’autre part, elle assume la responsabilité de chef de projet pour certains projets pilotes.

Les principales missions de la DEM sont :

· assurer la coordination de l’ensemble des projets (gardien de la démarche) et garantir la cohérence méthodologique;

· informer le COST et le Conseil d’Etat sur l’avancement des projets;

· gérer les projets pilotes;

· fournir les compétences, les services et la formation dans les domaines de nouvelle gestion publique, de l’organisation, de la qualité et de la gestion de projet à toutes les unités intéressées;

· favoriser une dynamique de la modernisation par l’organisation de séminaires de formation, de réunions, d’échanges, etc.;

· assurer le lien avec les autres administrations publiques (tant communales, cantonales que fédérale) actives dans ce domaine;

· assurer le lien avec les partenaires extérieurs spécialisés dans le management public et privé (IDHEAP, IMD, HEC, consultants);

· assurer, en collaboration avec le BIC, une communication interne et externe sur tous les aspects de la démarche de modernisation.

   
Structure de la DEM La structure mise en place dans le cadre de la démarche d’économies permet à la DEM de bénéficier aujourd’hui de l’appui d’un " animateur DEM " dans chaque département, lequel dispose également de son propre réseau de correspondants au sein de son département. Cette organisation en réseau, qui favorise des relations directes entre les départements et la direction de projet, mérite d’être conservée, voire développée, au service de la démarche de modernisation.

 

 

  Rôle de l’autorité politique
Le sens profond de la démarche
[début]
On n’entreprend pas la modernisation d’un Etat par simple souci d’efficacité gestionnaire ou financière mais pour contribuer au développement du canton et à la qualité de vie de ses habitants. Cette réforme a un sens profond, au service de valeurs sociales, morales et politiques qui fondent l’existence même de notre communauté cantonale. Elle a pour ambition de manifester concrètement que l’Etat et son administration sont au service du peuple, des citoyens et de tous les habitants de ce canton.

Une telle ambition ne peut aboutir que si elle est soutenue, expliquée et démontrée par les détenteurs de l’autorité politique, à commencer par le Conseil d’Etat et le Grand Conseil. Elle doit pouvoir s’appuyer sur une participation active et créative des collaborateurs de l’administration cantonale, ainsi que de toutes les instances publiques impliquées dans la fourniture de prestations aux habitants. Si ces conditions sont remplies, elle pourra être comprise et soutenue par l’ensemble de la population au nom de laquelle elle est entreprise.

Le Conseil d’Etat Le Conseil d’Etat est conscient du fait que la démarche de modernisation requiert un engagement clair et durable de chacun de ses membres. Le gouvernement doit constamment réaffirmer l’aspect prioritaire des réformes et le démontrer par ses décisions ponctuelles, sans quoi toute la démarche risque de s’enliser dans un retour aux anciennes routines. A cet égard, la mise en œuvre de la réorganisation de l’administration cantonale (projet DUPLO) illustrera la détermination du Conseil d’Etat. Elle jouera, dans l’ordre de la volonté politique, le rôle d’une colonne vertébrale sur laquelle pourront s’articuler les autres projets de modernisation.
Le Grand Conseil Il est également nécessaire que les parlementaires soient associés au processus de modernisation. La participation des élus du peuple est en effet de nature à renforcer la légitimité de la démarche et, par là, à améliorer ses chances de succès.

Cela suppose que le Grand Conseil soit lui-même capable de satisfaire aux exigences de réforme, donnant ainsi l’exemple de la mobilité et des capacités d’adaptation qu’il exige de l’administration. Dans cette perspective, il est proposé qu’une commission consultative soit créée. Ses membres seraient nommés par le Conseil d’Etat sur proposition du Grand Conseil.

Cette commission permettrait d’initier un plus grand nombre de députés à la problématique de la modernisation. Elle favoriserait par ailleurs l’établissement d’une coopération constructive entre les trois principaux partenaires concernés que sont le Conseil d’Etat, le Grand Conseil et l’administration.

Autres instances concernées Pour prévenir tout danger de vase clos et pour mieux prendre en compte la diversité du canton, les autorités cantonales veilleront à informer et à consulter régulièrement d’autres instances en prise directe sur le pays réel, telles que l’Union des communes vaudoises, les régions, les préfets, etc.

Dans le même esprit, il conviendra d’entretenir le lien avec les démarches de modernisation de la Confédération et d’autres cantons (collaborations intercantonales du type Vaud-Genève, Mittelland ou autres). Ces contacts à l’extérieur sont essentiels au développement du canton de Vaud et de sa fonction de carrefour au coeur de la Suisse romande.

   
Participation de la population et des collaborateurs de l’Etat
[début]
Finalement, le succès de la démarche de modernisation repose sur la participation de l’administration et le soutien des citoyens. Il ne suffit pas d’informer. Il faut encore être en mesure d’entendre les critiques et les suggestions des collaborateurs de l’administration et des usagers, et d’en tirer tous les éléments utiles à l’amélioration ou à la correction des réformes en cours. Le BIC ne saurait suffire à cette tâche. C’est pourquoi le Conseil d’Etat entend créer un " Conseil de la modernisation " , composé d’une dizaine de membres représentant le personnel et la société civile, qui servira d’organe de réflexion et de consultation. La mission de cette instance est identique à celle de la commission du Grand Conseil. Afin de partager leurs points de vue et d’enrichir leurs réflexions, ces deux organes pourront organiser des séances communes.

 

6. Conclusion

   
  Ce rapport définit les priorités et montre dans quelle direction le Conseil d’Etat entend engager la gestion des affaires publiques pour les années à venir. Il s’agit d’un effort général et systématique visant à adapter les services de l’Etat à l’évolution de la société et de ses besoins. Cet effort, commencé avec la démarche d’économies, est une nécessité si nous voulons que l’Etat puisse continuer d’assurer ses fonctions essentielles dans notre canton, et que la confiance des citoyens dans leurs institutions politiques soit rétablie.

S’inspirant aussi des expériences réalisées en Suisse et dans d’autres pays, cette démarche s’inscrit dans la continuité des réformes en cours (Hospices, Université de Lausanne, Service des finances, etc.). Elle requiert la participation de tous, à commencer par celle des collaborateurs de l’Etat.

  La démarche de modernisation ne manquera pas de bousculer de nombreuses habitudes. Il est à prévoir qu’elle se heurtera à de fortes résistances dans les milieux où l’on veut encore croire que tout pourrait continuer comme avant. Dès lors, elle doit pouvoir s’appuyer sur la ferme volonté des autorités politiques. Il est donc essentiel que le Grand Conseil la soutienne sans ambiguïté. Il affirmera ainsi sa volonté d’aller résolument de l’avant, en délivrant un message clair et stimulant aux collaborateurs de l’Etat et aux citoyens.
  Vu ce qui précède, le Conseil d’Etat a l’honneur de proposer au Grand Conseil :

de prendre acte du rapport sur la modernisation de l’Etat ;

de considérer ce rapport comme une réponse à la motion Broulis et consorts

 

 

 

Annexes

   
Annexe 1

Glossaire

Assurance qualité Ensemble des actions préétablies et systématiquement mises en œuvre dans le but de satisfaire aux exigences de qualité
Benchmarking Méthode permettant de déterminer la performance d’une organisation (produits, ressources et processus) par le biais de comparaisons avec des prestataires de services analogues (si possible les meilleurs, dans le secteur public ou privé)
Budget global Budget à disposition d’une entité (département, service, etc.) pour la réalisation d’objectifs fixés dans des contrats
   
Délégation Mécanisme permettant à un service de prendre des décisions sans en référer a priori à son autorité hiérarchique. Par analogie, compétences octroyées par un supérieur à ses subordonnés moyennant un cadrage de l’action (définition des objectifs, plan d’action, etc.)
   
Effets (outcomes) Ce qu’une politique, une organisation ou un programme réellement produit (incidences indirectes sur la société en général. Peuvent être souhaités ou non souhaités)
Efficacité Degré de réalisation des objectifs (résultats directs) d’une organisation, d’une politique ou d’un programme ou relation entre les objectifs fixés et les résultats obtenus
Efficience Relation entre les ressources utilisées et les produits obtenus. Une activité efficiente maximise le produit pour des intrants donnés, ou bien elle minimise les intrants pour un produit donné. Les mesures de l’efficience se présentent sous la forme de rapports entre les produits et les intrants (productivité), entre les dépenses et les produits (coûts unitaires) ou entre les coûts réels et les coûts escomptés
Indicateurs de performance Mesures quantitatives ou qualitatives de substitution utilisées pour estimer la performance. Les indicateurs ne fournissent pas forcément un tableau complet, mais ils apportent une indication pertinente aidant à porter un jugement
Intrants (inputs) Ressources financières, humaines et physiques utilisées ou consommées pour concevoir et exécuter une politique, un programme ou un projet. L’input d’une activité peut être aussi le produit d’une activité antérieure
Management total

de la qualité (total quality management)

Mode de management d’un organisme centré sur la qualité, basé sur la participation de tous ses membres, et visant au succès à long terme par la satisfaction de l’usager considéré comme client.
Nouvelle gestion publique (New Public Management) Réforme de l’administration et des organisations du secteur public ayant pour but de fournir à la population des prestations plus conformes à ses attentes et besoins, privilégiant la réalisation de buts clairement déterminés, prônant la transparence des coûts et la recherche d'un meilleur rapport coûts/prestations. En français: nouvelle gestion publique.
   
Objectif But que les unités administratives doivent atteindre. Ils sont plus précis que les missions qui n’expriment que les grandes finalités. Les objectifs opérationnels sont ceux qui peuvent être traduits en indicateurs (quantification, délais, etc.) mesurables
Pilotage (monitoring) Ensemble du suivi et des contrôles internes et externes nécessaires à une gestion orientée vers la satisfaction du citoyen-usager. Il comprend notamment l’audit, l’évaluation des politiques publiques et le reporting
Procédure Manière déterminée d’accomplir une activité (=standardisation des processus)
Processus Ensemble de moyens et d’activités liées qui transforment des éléments entrants (inputs) en éléments sortants (outputs). Les moyens peuvent inclure le personnel, les finances, les installations et équipements, les matériaux, les techniques et méthodes, le savoir-faire, etc.
Qualité Ensemble des caractéristiques d’une entité (produit mais aussi activité, processus, organisme, personne) qui lui confère l’aptitude à satisfaire les besoins exprimés ou implicites ou degré de satisfaction des attentes des citoyens-usagerss
   
Résultat (output) Aboutissement direct (immédiat, quantifiable) des activités d’une organisation sous forme de biens ou de services. Il ne renseigne nullement sur le résultat réel
   
Annexe 2  

Abréviations

   
ACV Administration cantonale vaudoise
BIC Bureau d'information et de communication de l'Etat de Vaud
CIEV Centre informatique de l'Etat de Vaud
COST Comité stratégique
DEM Démarche d'économies et de modernisation de l'Etat
DPSI Direction du pilotage des systèmes d'information
HEC Hautes études commerciales
IDHEAP Institut des hautes études en administration publique
IMD International Institute for Management Development, Lausanne
NGP Nouvelle gestion publique
NPM New Public Management
OCDE Organisation pour la coopération et le développement économique
SCRIS Service cantonal de recherche et d'information statistiques
   

 

 

Annexe 3

Les expériences des cantons de Genève,

Lucerne, Schaffhouse et du Valais2

   
  Le canton de Genève
     
Genève vise une administration plus performante   Depuis plusieurs années, l’administration cantonale genevoise a entrepris la restructuration de différents services. Actuellement, des réorganisations sectorielles et des démarches de qualité totale sont en cours, d’autres ont déjà été réalisées. L'expérience a été initiée par l’administration elle-même; elle n’est donc pas une démarche isolée, mais s’inscrit dans la stratégie du Conseil d’Etat qui consiste à repenser globalement le fonctionnement de l’administration.
    L’objectif prioritaire n’est pas de réaliser des économies budgétaires mais de rendre l’administration plus performante, mieux adaptée à un environnement changeant, à l’écoute de ses citoyens-usagers, en faisant mieux connaître ses prestations et en augmentant la transparence de ses processus, ainsi que la motivation et les responsabilités des agents de la fonction publique.
     
    Plus précisément, la réforme vise :

· une distinction claire entre les compétences politico-stratégiques, qui appartiennent à l’exécutif et au législatif, et les compétences managériales, attribuées aux unités administratives

· le rapprochement de l’administration et du citoyen-usager, permettant de mieux saisir les besoins de la population et donc de cibler avec plus de précision les prestations à lui offrir

· une gestion opérationnelle axée sur les résultats des prestations, qui doivent répondre à des critères précis, tant quantitatifs que qualitatifs

· la transparence au niveau des coûts, permettant une gestion orientée vers l’efficacité et des comparaisons intercantonales

· une délégation des compétences et des tâches, qui valorise le potentiel des cadres et des collaborateurs et encourage l’innovation.

     
    Pour tester le concept, le canton de Genève a procédé en cinq étapes :

· conditions de fonctionnement : concernant la comptabilité, la gestion du personnel, le traitement budgétaire et l'utilisation des bénéfices ou des économies éventuelles

· analyse : portant sur les missions, les clients, les prestations, les effets, le processus de production, le calcul du coût des prestations et le choix des critères de performance

· accord de prestations : négocié entre le service pilote et l'autorité politique

· mise en œuvre : d'une durée entre deux et quatre ans

· évaluation : à faire à la fin de l'expérience pour permettre au Conseil d'Etat de se prononcer sur une éventuelle institutionnalisation de la démarche et son extension à d'autres services, voire à l'ensemble de l'administration.

 

    Trois séries de services pilotes ont été sélectionnés pour une expérience s'achevant à la fin de l'an 2000. Leur démarrage est échelonné sur trois ans (1er janvier 1997, 1er janvier 1998, 1er janvier 1999).
     
Le Conseil d'Etat fixe les conditions nécessaires au démarrage   L’autorisation de fonctionnement est accordée à une unité administrative par le Conseil d’Etat pour autant que les exigences suivantes soient satisfaites :

· une définition des missions et objectifs de l’unité avec identification des prestations (produits) et calcul de leur coût

· la signature d’un accord de prestations

· la mise en place des instruments de contrôle et de gestion indispensables (comptabilité analytique, tableaux de bord, contrôle de gestion, etc.)

· le respect des "Conditions de fonctionnement des services pilotes de l’expérience de New Public Management (NPM)", définies dans un document approuvé par le Conseil d’Etat.

     
Les principales caractéristiques de la démarche genevoise   Accompagnement des services pilotes : l’expérience est conduite par un comité de pilotage interdépartemental, présidé par le Directeur général de l’Office du personnel de l’Etat et comprenant, entre autres, les directeurs des services pilotes, des représentants de la Direction générale des finances, de l’Inspection cantonale des finances et des services financiers des départements, un représentant du collège des Secrétaires généraux, un représentant des responsables de personnel, un professeur de l’IDHEAP, et le "coordinateur NPM".

Ce comité de pilotage accompagne et soutient les services pilotes tout au long de l’expérience. Il fixe la forme des rapports sur l’évolution du projet et décide de l’exécution du contrôle des résultats intermédiaires et finaux. Il coordonne la démarche et permet l’échange d’informations entre les projets pilotes. Il examine les possibilités d’extension de l’expérience à d’autres unités et assure la liaison avec le Conseil d’Etat.

    Enveloppe budgétaire : les budgets des services pilotes figurent au budget de l’Etat sous la forme traditionnelle. Cependant, en cours d’exécution du budget, seul importe le respect d’une "enveloppe globale" qui est mise à sa disposition. Cette enveloppe correspond à la différence entre les charges et les revenus budgétisés.
    Budget par groupes de produits : chaque service pilote présente également un budget complet de fonctionnement réparti par groupes de produits. Ce budget, dit "analytique-économique", prend en compte, dans la mesure du possible, tous les frais encourus par le service ainsi que les revenus qu’il génère, qu’ils soient officiellement budgétisés ou non (amortissements et intérêts de l’année, frais de structure, loyers, imputations internes, etc.).
    Responsabilité générale des services pilotes : chaque service pilote a l’entière responsabilité de la réalisation des tâches qui lui sont assigées. C’est pourquoi, tout en respectant son enveloppe budgétaire, il doit utiliser de manière optimale les moyens financiers qui lui sont alloués pour remplir sa mission (sans être tenu de respecter les natures et sous-natures de son budget).
    Outils de gestion : les services pilotes doivent mettre en place les outils de gestion nécessaires au contrôle qualitatif et quantitatif de leurs prestations (comptabilité analytique, tableaux de bord, enquêtes de satisfaction, etc.).
    Participation au résultat : la différence entre l’enveloppe budgétisée et le résultat effectif est traitée selon le principe bonus/malus. La direction compétente détermine, dans le cadre de l’accord de prestations, la portion de cette différence à créditer ou à débiter dans le budget suivant. Après prélèvement de 50% au profit du compte général de l’Etat, un éventuel bonus reste à la disposition du service pilote, qui peut l’utiliser pour développer ses activités et améliorer son efficacité, une partie pouvant servir à accorder au personnel une participation au résultat (prime unique et forfaitaire, plafonnée).
    Développement des activités : chaque service pilote est expressément encouragé à préparer et à promouvoir des activités et des prestations nouvelles dans le cadre de la mission générale qui lui a été assignée. Comme pour les activités et prestations existantes, les charges et revenus additionnels sont intégralement imputés au service.
    Politique du personnel : pour l’exécution du budget, les services pilotes ne sont pas liés par le plan de gestion des postes de l’Etat. Pendant l’expérimentation et pour le personnel nouvellement engagé dans les services pilotes, il n’y a pas de modification du statut du personnel donc des conditions d’engagement et de la politique salariale. Cependant, pour tenir compte du principe de réversibilité, certains des nouveaux collaborateurs peuvent être engagés avec un statut d’employé non permanent. Pour le personnel déjà en fonction au début de l’expérience NPM, une résiliation des rapports de travail liée à cette expérience est exclue; demeurent cependant réservées les dispositions prévues par la loi.
    Réversibilité : l’arrêt de l’expérience est possible en tout temps.
    Inspection interne : l’inspection cantonale des finances contrôle les services pilotes pendant l’expérience en procédant à une révision annuelle, éventuellement précédée de contrôles intermédiaires. De plus, chaque année, un contrôle global sera effectué avec la collaboration d’une fiduciaire indépendante.
    Le canton de Lucerne
    C'est à l'instigation de deux députés que la philosophie de la nouvelle gestion publique a été introduite dans le canton de Lucerne. La période d'essai a commencé en 1996 avec des contrats de prestations et un budget global dans 19 services pilotes; elle durera jusqu'à la fin 1999.
    Cette expérience vise trois objectifs : orienter vers les résultats et l'efficacité, introduire le mécanisme de marché et la compétition, décentraliser les structures et les responsabilités.
Les conditions-cadre et l'organisation du projet sont clairement définies   Les conditions-cadre sont les suivantes :

· définir les objectifs pour les activités commerciales et non commerciales de l’administration

· considérer que l’efficience de la gestion publique est d'intérêt général

· créer la compétition entre les services qui offrent les mêmes types de prestations et donner un choix aux clients

· superviser les relations contractuelles entre office et département

· envisager le maximum de délégation aux responsables opérationnels

· assurer la garantie de non licenciement pour des raisons organisationnelles.

 

    L'organisation du projet comprend les éléments suivants :

· un chef de projet à plein temps avec 2,5 collaborateurs; conseils scientifiques généraux et dans les domaines de la comptabilité et du calcul des coûts

· des séances mensuelles entre la direction du projet, les conseillers et les responsables des départements et services concernés

· un comité exécutif comme organe de liaison entre l’administration et le gouvernement se composant du chancelier d’Etat, de l’administrateur des finances, du directeur de l’office du personnel et du chef de projet

· une délégation du Conseil d'Etat se composant de trois membres du gouvernement

· une commission spéciale du Grand Conseil.

 

 

 

Les premiers résultats sont partiels, mais probants   Neuf services ont reçu un budget global pour la première fois en 1996 à hauteur du budget de 1995 avec un contrat de prestations inchangé. Huit de ces services n’ont pas épuisé ce budget global et ont, au contraire, dépensé 5-10% en moyenne de moins que le budget global prévu.
    Le processus de changement culturel est maintenant lancé; d'autres projets de réforme ont été mis en œuvre, comme la gestion des hôpitaux orientée vers les résultats. La gestion du projet par une personne à plein temps, assistée d'un secrétariat bien fourni, est un atout indéniable. Parmi les aspects négatifs de l'expérience menée jusqu'à ce jour, il faut relever qu'aucune optimisation de la performance et de la qualité du produit n'a été prévue, ni aucune évaluation du projet et de ses conséquences matérielles.
    Le canton de Schaffhouse
    C'est sous la pression financière que le gouvernement schaffhousois a décidé de chercher de nouvelles méthodes de gestion de l'administration en s'inspirant du modèle lucernois.
    Les objectifs sont de :

· séparer la gestion stratégique de la gestion opérationnelle

· définir des standards détaillés de coûts, de prestations et de qualités pour les services

· garantir des standards de prestations et de qualité

· demander un minimum de restrictions opérationnelles aux services concernés

· rechercher l'efficience dans l'accomplissement des tâches.

 

    Dès le printemps 1995, les bases ont été élaborées pour les nouveaux instruments et la nouvelle culture de gestion. Quatre services commencent l'expérience en 1997, six en 1998 et entre quatre et six (pas encore choisis) en 1999, avec des contrats de prestations et un budget par groupes de produits.
    Le projet s'organise de la manière suivante :

· un chef de projet interne, le directeur général du département des finances, travaille à temps partiel

· deux chefs de projet externes, l'un du secteur privé et l'autre du monde universitaire

· une commission de coordination réunissant les personnes qui gèrent les projets et les chefs des services concernés

· un comité de pilotage avec deux conseillers d'Etat et deux secrétaires de département.

 

    Bien que les rapports annuels des premiers services pilotes ne soient pas encore disponibles, une première évaluation de l'expérience peut être faite :

· le processus de changement culturel est en cours

· l'optimisation des coûts, des prestations et de la qualité des produits de l'administration est en route

· la collaboration interne se développe : les premiers services pilotes aident ceux qui commencent l'expérience après eux

· une gestion de projet à plein temps manque

· l'évaluation du projet et de ses résultats matériels manque.

 

 

    Le canton du Valais
    Lancée en 1994, la réforme valaisanne procède à la fois d’un effort d’économie à court terme et d’une volonté de refonte globale du secteur public à moyen terme. Elle correspond de ce fait à une vision élargie de la nouvelle gestion publique (NGP).
"Réformes 2000" comprend cinq projets de base   Cette réforme comporte plusieurs projets : Administration 2000, Justice 2000, Education 2000, Institutions 2000 et Parlement 2000. Ils visent tous, à des degrés divers, à une augmentation significative de l’efficacité de l’action publique, une meilleure satisfaction des citoyens-clients grâce à une concentration de l’action de l’Etat sur ses tâches essentielles. Ils cherchent à concilier maîtrise des coûts, qualité des prestations et développement du canton. Ils diffèrent par contre dans leur organisation et dans leur état d’avancement.
    A ces projets "2000" de base s’ajoutent un certain nombre d’autres actions réformatrices qui concernent des aspects importants de l’organisation de la vie politique et administrative : Gouvernement 2000 (nouvelle organisation des départements), Communes 2000 (effort pour développer la NGP auprès des collectivités locales) et Citoyen 2000 (projet de dialogue entre autorités et citoyens par téléphone, fax et Internet).
     
Administration 2000 est le projet central de cette réforme globale   Administration 2000 se divise en quatre projets partiels (analyse des prestations, management par contrats, calcul des coûts et comptabilité analytique, gestion des ressources humaines) et en six unités pilotes (Service de la santé, Section des routes nationales, Office des améliorations foncières, Service des bâtiments, Service du feu et de la protection civile, Etablissement de l'enseignement professionnel supérieur). Les projets partiels concernent l’ensemble de l’administration.

Dans un premier temps, les six unités pilotes sont chargées d’explorer "pragmatiquement" la nouvelle gestion publique, sa philosophie, ses instruments (contrats, controlling, besoins en formation, etc.), de même que leurs incidences sur le fonctionnement de l’administration, du gouvernement, du parlement et sur le comportement des habitants-clients. Elles forment les têtes de pont pour la mise en œuvre des autres projets partiels (nouvel instrument de pilotage, calcul des coûts ainsi que nouvelle comptabilité financière et analytique, nouvelle culture administrative).

Les contrats de prestations sont négociés à trois niveaux : parlement, gouvernement, départements   Dans le système valaisan, les mandats de prestations sont établis sous la forme d'un enchaînement de contrats négociés aux niveaux parlementaire, gouvernemental et départemental. Ces contrats sont à la fois un plan d’action, un plan financier et un document permettant la planification, le contrôle et l’évaluation de l’action publique via des critères de performance (qualité, effectivité, efficacité, efficience et respect du droit).
    Le contrat politique, valable pour une durée de quatre ans, résulte de la concertation entre le parlement et le gouvernement. Il est l’instrument par lequel parlement et gouvernement négocient et précisent la manière dont les départements et services vont accomplir leur mission durant les quatre ans à venir (objectifs à atteindre sur la base des législations en vigueur, budgets à disposition, critères à respecter pour appliquer les missions légales). Ils donnent naissance à deux autres contrats (contrat de management entre gouvernement et départements et contrat d’exécution entre département et services) centrés sur la description des groupes de produits et des produits à fournir pour atteindre les objectifs fixés. La planification, le pilotage et le contrôle des trois contrats seront assurés par un système de controlling approprié à chacun des trois niveaux dont la mise en place est prévue pour 1997 et 1998.
Le parlement s'est impliqué fortement dans les réformes   Sur la base de travaux réalisés en 1995, les départements et les unités pilotes concernés ont rédigé durant le premier semestre 1996 leurs projets de contrats politiques, puis leurs projets de contrats de management. Le parlement a donné son feu vert au début des expériences pilotes en janvier 1997 et procédé à une première négociation des objectifs proposés par les contrats avec le gouvernement. L’une des caractéristiques d’Administration 2000 en 1996 est donc la forte implication du parlement dans les réformes via l'examen des contrats politiques qui lui permet à la fois de s'initier à la nouvelle gestion publique, de commencer à co-définir avec le gouvernement les objectifs, critères de performance, priorités et budgets de certaines politiques, de jeter les bases de nouveaux processus d'évaluation et de controlling parlementaire et surtout de réfléchir aux réorganisations internes qu'il doit opérer s'il veut jouer un rôle plus actif dans la vie publique du canton.
Les premiers résultats de "Réformes 2000" en bref  

· Une nouvelle organisation de la présidence et des départements : cinq départements et une présidence renforcée (chargé d’information, centre de management public)

· Administration 2000 : analyse des prestations de l'administration et mise en oeuvre des mesures d’économies adoptées (réduction de 168 postes à ce jour), loi sur les clauses expérimentales et début des expériences pilotes au 1er février 1997 (gestion par contrats), nouveaux concepts de gestion financière et de gestion des ressources humaines

· Education 2000 : analyse des prestations du système éducatif valaisan et 30 propositions pour son organisation future, deux avant-projets de lois

· Institutions 2000 : loi sur les subventions

· Justice 2000 : analyse des prestations et propositions d'améliorations, nomination de la commission de justice chargée de rénover la justice valaisanne.

 

Les réformes se poursuivent (législature 1997-2001)  

· Administration 2000 : expériences pilotes et adaptation des contrats des six unités pilotes aux trois niveaux (politique, management et exécution), poursuite des mesures d'économie décidées, rationalisation de la gestion administrative et financière par la mise sur pied d'un système de gestion intégré et modulaire, premières réalisations pour les unités pilotes (cercles de qualités, formation, guide du personnel...) et mise en oeuvre progressive pour l'ensemble de l'administration, développement d'outils de gestion du personnel

· Education 2000 : adoption des avant-projets de loi par le Conseil d'Etat et mise en consultation, présentation de la loi au parlement et, en cas d'adoption par le parlement, voire par le peuple, application progressive de la loi dès l'automne 1998 et mise en place des structures nécessaires.

· Justice 2000 : le calendrier sera établi en fonction des travaux de la commission de justice; les premières propositions sont attendues pour la fin 1997

· Parlement 2000 : l'avancement des travaux sera fixé par les commissions parlementaires concernées (bureau, commission Réformes 2000, commissions permanentes)

· Institutions 2000 : développement concret du système d'enveloppes budgétaires par secteur.